jeudi 24 août 2017

Meliacor, le tombeau de glace, pages 121-140

Degrouve avait le crâne rasé. Son visage le faisait paraître dans la fin de la vingtaine, mais en réalité il s'approchait de la mi trentaine. Certainement à cause de ses traits finement dessinés, comme si son faciès avait été sculpté dans le marbre. Sean était un très beau jeune homme avec un sourire éblouissant qui cachait bien des blessures. De ce que Bender savait de son camarade et ami, il avait débuté sa carrière professionnelle comme journaliste de guerre. Il avait vadrouillé sur un bon nombre de fronts pendant 5 ans avant de décider de se reconvertir. Il passa les tests d'aptitudes pour les commandos aéroportés de Tunghusk à 23 ans.


Puis à 26 décida de changer à nouveau d'orientation pour s'enrôler chez une compagnie de mercenaires: les Storm Bringers. Bonne réputation, avec un savoir faire martial conséquent et des équipements hi tech. Une bonne bande qui essayait de ne pas pourrir l'univers plus que nécessaire. Cependant à 29 ans Sean décida de partir. Il avait baisser les bras sur la vie et avait vécu dans l'absolue misère, sans toucher à son argent, pendant deux ans avant de tenter sa chance avec les white owls. Qu'est ce qui l'avait poussé à faire ces changements ? Degrouve n'en avait jamais parlé, il n'y avait que ses cauchemars nocturnes récurrents pour donner un indice. Le jeune homme était hanté par les morts et cherchait à les fuir mais à chaque fois, peu importe où il se trouvait, les décédés revenaient le voir... En tant que journaliste il avait du immortaliser bien des cauchemars. En tant que militaire, il avait du participer à quelques horreurs...


  • Hey Serg, content que vous soyez le dernier visage que je verrai – ricana Sean.
  • Ne raconte pas de bêtises - sourit jaune Bender. Il y avait trop de vérité dans cette blague - J'ai trouvé un arrangement avec leur boss. Personne ne vous touchera si je réussi une mission.
  • Une mission ? On part en mission ? - s'excita Sean.
  • Rien que moi malheureusement - précisa Bender
  • Oh je vois - dit Sean déçu. Il tourna brusquement la tête comme s'il venait de voir un truc suspect.
  • Qu'est ce qui se passe ? - demanda le sergent inquiet
  • J'ai cru entendre des cliquetis, mais j'ai peut être prit un coup sur la tête - sourit Degrouve
  • "Des cliquetis ?" - mais avant qu'il ne puisse en demander plus, il fut interrompu par Sean
  • C'est quoi la mission ? - demanda t il
  • Je vais capturer le gros chat - sourit Bender en retour en essayant de se montrer le plus confiant possible.


  • Ouh...- fit ce dernier comme s'il venait de voir quelqu'un se faire très mal - J'aurai une question du coup. Est ce qu'on peut se convertir à une religion à la volée ? Parceque là je sens que j'ai comme une poussée de foi. Je la sens montée en moi, c'est violent
  • "Petit con" - pensa Bender en souriant - Fait moi confiance un petit peu. Je vous sortirai de là.
  • Je n'en doute pas Serg….Bonne chance.
  • Ouais. Merci.
  • Le temps est écoulé. Rendez vous dans 15 minutes – entendit-il alors. L’image de Sean se substitua avec celle de Morel dans son cabinet, puis l’appel fut coupé. Bender prit une profonde inspiration, puis se prit la tête entre les mains au dessus de la table. Derrière la bravade il y avait la peur, tapie confortablement dans son âme. Ses espoirs étaient tournés sur l'équipe qui allait l'accompagner et sur le plan de Morel, deux inconnues à gérer. Ce qui n'améliorait en rien le stress qui lui faisait tapoter le sol du pied.


On sonna à sa porte. Le bruit n'était pas agressif, ce qui étonna le sergent. Il s'attendait à une sirène qui lui aurait vrillé les tympans: un autre cadeau de Morel.
Lorsqu’il ouvrit la porte, un black owl lui remis un petit paquet tenant dans la paume de sa main. A l’intérieur se trouvait son médicament, en forme de capsules. Jonathan chercha un verre vide qu'il ne trouva que dans les toilettes, au dessus du lavabo. L'endroit était très intime, sans espace superflu.


Il remplit son verre et plongea une capsule à l’intérieur. L’enrobage entra en effervescence et changea la constitution du liquide qui devint plus gélatineux, avant de virer à l’orange. Bender soupira puis but le contenu cul sec, avant de pousser un râle de dégoût. Ce produit était aussi plaisant à boire que de se percer la peau sous les ongles avec des aiguilles. Bien sûr ce n'était qu'un exagération de son esprit, en réalité le produit était aussi plaisant à boire que de se percer la peau sous un ongle avec une aiguille.
L'étroitesse de ces toilettes était pénible, cependant elle rendait la surveillance plus compliquée. Il suffisait à Jonathan de cacher le message entre ses mains, une paume au dessus, et aucune caméra ne pouvait capturer quoi que ce soit.
Le sergent sorti alors le message qu'il avait habillement coincé contre l'élastique de son pantalon, puis le couvrit d'une main. Et dans ce creux obscur il pouvait lire:
  • “Je sais qui vous êtes, même si nous n’avons jamais eu l’occasion de nous rencontrer. Vous m’avez sauvé la vie, il y a huit ans de cela, vous avez sauvé un vaisseau civil dans le secteur Osna, j’y étais avec ma petite fille. Vos vies sont peut être en danger. Si tel est le cas, venez me voir et je repayerais ma dette”


Jonathan eut une bouffée d'émotion. Il se rappela avec émoi qu'il n'avait pas "sauvé" que des personnes comme Morel. Mais il y avait également des gens bien. L'espoir, comme un verre parasite, bougea la tête quelque part dans son estomac. Une petite larme coula le long de sa joue alors qu'il serra les mains. Il y avait réellement un minuscule chemin éclairé hors de ce cimetière, il n'était pas tout seul, et cela faisait un bien fou…


Après s’être calmé, il se regarda dans le miroir. Le reflet n'était pas enchanteur: vieux, fatigué, avec des cernes sous les yeux, visiblement sous pression. Le temps était passé si vite, il se rappelait clairement d'hier mais ce hier était il y a plus d'une dizaine d'années.
  • "Pff, quel laissé allé" - se dit il, en passant la main dans ses cheveux blancs. La déception était malheureusement au rendez-vous du temps.


Le sergent se détourna de son reflet avec un soupir épuisé, puis pissa un coup dans les vécés avant de jeter le bout papier. Une fois la chasse tirée et les mains désinfectées, il se posa à nouveau sur sa chaise tortionnaire. Quelques minutes le séparaient de l'heure du rendez vous, alors avant qu'un black owl ne vienne le chercher, Bender décida d'étudier un petit peu les informations à sa disposition.
  • Juvianne, j'aimerai accéder aux informations concernant l'opération de capture.
  • Une seconde - répondit la voix de l'IV en se matérialisant au dessus de la table. Bender pu voir son visage pour la première fois et là il pu comprendre pourquoi le regard de Morel se focalisait sur l'hologramme. Juvianne n'était pas vraiment magnifique, oh c'était une belle femme. Mais c'était plutôt qu'elle donnait l'impression d'être vivante. De par la manière dont elle tirait le visage, comme en pleine réflexion, il était difficile de ne pas penser qu'elle était humaine - Posez votre pass sur le terminal et vous aurez accès au dossier.


  • Le pass ? Vous voulez dire la carte magnétique ? - demanda Jonathan
  • Non, le pass biométrique - répondit Juvianne - la carte magnétique ne sert qu'à ouvrir votre porte - expliqua-t-elle patiemment.
  • Donc l'information est encodée la dessus ? - demanda Bender en déclipant le petit rectangle plastique de la poche de sa chemise.
  • Non - le regarda l'IV confuse, comme si elle venait d'entendre une absurdité. Celui qui avait programmé cette IV devait être un virtuose - le pass défini vos droits d'accès.
  • Oh ok. Merci - la remercia Bender en se sentant un petit peu stupide.
  • Je vous souhaite une excellente journée - lui souhaita Juvianne avant de disparaître.


Une fois le pass posé sur le terminal, un dossier apparu qu'il ouvrit immédiatement. Beaucoup d'informations étaient cryptées mais de ce que le sergent pouvait voir:
  • "Impressionnant" - pensa-t-il de plus en plus impressionné à mesure qu'il changeait de profils - "D'où sortent ces gars ?" - ne put il s'empêcher de se demander.


La confiance de Morel lui était désormais compréhensible. Petit à petit il commençait à voir une image claire du chemin qu’il devait prendre. Comme un jeu de probabilité, les différentes possibilités envahissaient son esprit et il étudiait celles dont le résultat lui convenait, les modifiant en incluant d’avantage de données dans son processus cognitif. La tâche n’allait pas être impossible, ils avaient une chance.

De ce qu’il put voir, son équipe était uniquement composée de spécialistes, et cette “sparrow”… son profil était incroyable : 250 missions accomplies avec brio. Elle avait passée toute sa vie sur le champ de batailles. “Spark gun”:un tireur d'élite avec une précision à 99 % et son arme de prédilection était aussi rare que terrifiante entre des mains expertes. “Godefroi”: un spécialiste du combat rapproché. Ambidextre avec des caractéristiques physiques inimaginables pour un humain même augmenté, et pourtant il était à 85% pur… En comparaison, son petit bataillon habituel était composé de bras cassés asthmatiques, mais c’était Son escouade et il ne l'échangerait pour rien au monde. Cependant ce n'était pas ces experts qui représentaient le véritable danger pour Cid, mais ce truc: G0t0n7. Contre cette saloperie le félin n'avait aucune chance.
- "Pourquoi avoir développé une arme pareille Morel !!" - pensa Bender en jouant des mâchoires, dégoutté par ce qu'il voyait. Les 80 % des informations étaient cryptées mais le peu qu'il pu lire sur le sujet était suffisant pour le révolter.
On sonna à la porte, Bender se leva résolu à tirer ses gars de là. Son plan était désormais réalisable maintenant que Cid n'allait plus être un problème.
Les hurlements n'étaient plus audibles. Il n'y avait que le bruit du vent heurtant violemment contre les casques. Cid filait comme le vent au milieu du tunnel délabré. Malgré la vitesse impressionnante, sa vision était claire et ses mouvements agiles. Il du bondir à plusieurs reprises au dessus de débris ou contre les murs, en parkour, pour éviter des pierres qui bloquaient une partie du chemin. Cependant cette course folle du prendre fin.


  • Un éboulement ?! Fait chier !!! – fulmina Cid en stoppant net devant la masse de roches et de glaces qui obturait la route. Laissant dans son sillage une longue traînée de freinage.
  • Du calme, du calme - annonça Dalanda en descendant du dos du z'hum, épuisée. S’agripper au cou de cette force de la nature était plus crevant qu'elle l'avait imaginé. L'armure n'avait pu absorber tout l'effort nécessaire pour rester en selle, ce qui transféra une partie de la tension sur ses muscles - Je vais scanner la zone peut être que l’éboulement n’est pas profond – expliqua-t-elle son plan.
  • Je SUIS calme ! – rectifia Cid en se relevant sur ses pattes arrières tout en s'étirant. Avoir quelqu'un sur le dos était toujours désagréable comme sensation, physiquement et psychologiquement – je n’ai simplement pas envie de me retrouver coincer ici avec cette chose à mes trousses.


  • Je te rassure, moi non plus. Mais vu le vent que tu lui as mis on a au minimum une bonne vingtaine de minutes devant nous – répondit elle en fouillant dans le sac – Ha ! je savais que le sac serait utile – dit-elle en lançant un regard moqueur au félin. Malgré le casque il pouvait clairement imaginé son petit sourir vainqueur.
  • Ouais, ouais, mais je maintiens que c'était de la folie ! C'était mon job d'aller le chercher et...
  • Le mien de tenir compagnie à l'autre truc ? - le coupa Dalanda. Cid resta immobile, occupé à imaginer ce scénario impossible.
  • Hmmpf ! - finit il par souffler en croisant les bras.
  • Tu vois que j'avais raison.
  • Tu vas me le ressortir combien de fois ?
  • Quoi, que j'avais raison ? Je ne sais pas, encore 1 millier de fois environ - rigola Dalanda ce qui arracha aussi un sourire à Marshall - Et  voilà le trésor - annonça Eiling en sortant une sorte de sphère dont la surface était parcourue de creux paraboliques d’à peine quelques centimètres de diamètres.
  • “Mouais les femmes et les sacs” - voulu-t-il commenté mais il se mordit la langue, le timing n'était plus le bon.


Dalanda plaça l’appareil au sol et ils reculèrent de quelques pas avant qu’elle enclenche l’appareil à distance à l’aide de sa console sur l’avant-bras.


  • “Grrr” - Cid serra les dents alors que les ultrasons parcouraient les tunnels en vagues. Il avait oublié de configurer le son de son casque et ses oreilles en payaient le prix. Le retour des vibrations sonores dessinait une image analysée par l’appareil qui transférait les données issues de son écholocalisation aux armures.
  • Mouais, le chemin est bloqué. L’éboulement s’étend sur plusieurs centaines de mètres il te faudra bien plus d’une journée pour créer un passage – commenta, la jeune femme, les résultats. Êtres bloqués ici était vraiment l'une des pires choses qui pouvait arriver.
  • Cinq à six heures tout au plus, avec une très longue pause café – rectifia Cid en observant le tas de roches, songeur.
  • Mais bien sur, si tu veux - rétorqua Dalanda en étudiant la carte.
  • Non mais c’est vrai – répondit Cid en adoptant un ton vexé.
  • Ahan - répondit elle sans l'écouter, occupée à chercher une issue - Il y a un mur fragilisé pas loin, qui donne accès à…à un autre tunnel on dirait.
  • Super ! J'adore les tunnels - grommela Cid - Des tunnels, dans des tunnels, dans des tunnels qui ont des tunnels !
  • Ça va ? - demanda Eiling inquiète


  • Ouais... Non ! J'ai faim. Il y a de la viande ? Pitié dis moi qu'il y a un steak juteux quelque part dans ton sac magique - supplia Cid
  • Euh non. Et ce n'est pas en demandant tout le temps que la viande finira par apparaître alors tient et bon appétit - répondit la jeune femme en lui tendant une boite à repas - Tiens ! - dit elle à nouveau au félin qui finit par prendre la ration
  • La prochaine fois...
  • Oui, oui, je prendrai de la viande.
  • Y'as intérêt ! - fulmina Marshall en connectant la boîte à l'armure - je vais perdre les crocs à force, avec ces cochonneries !
La machine demanda confirmation des options: intraveineuse ou stomacale. Cid choisit avec une moue dégoutée l'option intraveineuse. Et le cocktail fut libéré dans son organisme au travers d'une aiguille qui cibla automatiquement la veine céphalique.
  • Bah ! - s'exclama le félin en exprimant vocalement son mécontentement. Histoire de bien faire comprendre un petit peu plus, que c'était une hérésie - montre moi où c'est que je dois faire un trou !
  • C'est par là - répondit Dalanda en le guidant dans la direction indiquée par la carte - Je suis désolée... - ajouta t elle ensuite. Au ton de voix, le félin comprit que c'était sérieux. Il devait ravaler toutes ses piques concernant l'absence de protéines qu'il pouvait mâcher , la viande rouge, la vraie bectance !


  • De quoi ? - demanda-t-il, même si il avait déjà une idée de ce qui pouvait traverser l'esprit de la jeune femme.
  • Si seulement j’avais préparé cette opération comme il faut, rien de tout…
  • "Cela ne serait arrivé" - termina Cid la phrase dans sa tête. Cependant il interrompit Dalanda avec une légère taloche sur la nuque
  • Aïe ! Hey ! Qu'est ce que tu fous ?! - hurla cette dernière qui faillit tomber tête la première au sol. C'était uniquement grâce aux compensateurs de l'armure qu'elle tint debout.
  • C'est pour te remettre les idées en place. Et ne fait pas cette tête j'y suis allé mollo de chez mollo - se justifia le félin.
  • Ahan ! Ok, explique moi en quoi m'arracher la tête était sensé me remonter le moral ? - s'enquit Dalanda en lui perçant la visière du regard, dans une position corporelle qui disait "vas-y ! je t'écoute et ne me raconte pas de bobards !"
  • Là je trouve que tu exagères... Sigh, bon je suis désolé j'ai cru que c'était malin et j'ai pensé que tu étais plus solide que ça...
  • Je te demande pardon ?!!


  • Kruu rru rru !
  • Et tu trouve ça drôle ?
  • Au moins tu déborde d'énergie là, pas vrai ?
  • Argh qu'est ce que tu m'énerves !  - réagit Eiling en continuant son chemin comme une pile.
  • "Hihihi bravo l'artiste, chapeau bas et bottes de cuir !"
  • "..."
  • Hey, hey je suis désolé ok ? Ce n'est pas vraiment ma spécialité. Les sentiments et tout ça - s'excusa Cid en lui prenant le bras - Ecoute, ça ne fait qu’une journée que nous sommes arrivés...
  • C’est ça le pire, une journée et regarde le bordel – répondit elle en ignorant le “fillette”.
  • Oué c’est un gros bordel mais je m’éclate comme un petit fou. Tu as planifié cette mission pour deux semaines de toute façon n’est-il pas ?
  • N’est-il pas ? – sourit-elle en se retournant et en marchant à reculons – tu as de ces manières de parler des fois.
  • Quelques fois je m’étonne moi-même – répondit-il en ajoutant pour lui-même “le pire c’est que c’est vrai”.


  • Je me dis juste, que j'aurai pu mieux prévoir.
  • Et moi je te réponds que non. Vu le blocus informationnel mis en place tu n'aurais pas pu faire mieux. Si tu m'en avais parlé..."ah merde !" - Cid ne percuta que trop tard que ce qu'il allait dire allait être mal compris. Dans son esprit ce n'était pas un reproche mais une manière de dire:"si tu m'avais demandé de l'aide j'aurai pu apporter des solutions. Je suis compétent sur ce genre de choses". Mais ce qu'Eiling pouvait comprendre était plus similaire à : "la prochaine fois n'essaye pas de faire mon boulot. Tu n'y comprends rien de toute façon". Étrange que les mêmes mots pouvaient avoir un sens différent.
  • Je sais. Je suis désolée. Je voulais juste y arriver par moi même, c'est pour mon fils après tout.
  • "Hihihi ah bah b..."
  • "TA GUEULE !"
  • En tous cas je m'amuse comme un petit fou kruu rru rru - rigola Cid mais sa manœuvre maladroite n'eut pour réponse que le silence - "Quel con !"


Ils s’arrêtèrent devant un mur à l’apparence similaire à tout ce qui les entourait mais en passant la paume dessus et en en appuyant légèrement, Cid constata qu’en effet il n'y avait rien derrière.
  • A toi l’honneur – lui dit Dalanda un petit peu déprimée.
  • Tu es certaines que tu ne veux pas le faire. Ou est ce que tu as peur de te casser un ongle ? Kruu rru rru...
  • "Je te conseille de ne plus rien dire" - suggéra une voix dans sa tête
  • "HIHIHI" - explosa de rire l'autre.


Marshall arma sa frappe et son poing éclata le mur créant l’espace nécessaire pour s’y faufiler.


  • “Erf c’était mou ça, je fatigue déjà ? » - commenta-t-il sa performance avant de dire, accompagné de la gestuelle chevaleresque - honneur aux dames
Dalanda passa la brèche sans dire un mot ce qui amena Cid à se gratter le sommet du casque, conscient d'avoir merdé. Troublé et ne sachant pas vraiment comment corriger son manque de tact. D'ailleurs, le polymétal  du casque commençait à avoir une bonne collection de rayures.
Avant de se faufiler il jeta un dernier coup d’œil dans le tunnel en espérant, tout en craignant, de voir la brume avancer. Mais il n’y avait rien à part des bouts de roches et de glace.
  • “Étrange” - la créature semblait avoir de bonne jambes, alors pourquoi prenait elle autant de temps. C'était une bonne chose, voire excellente, qu'elle soit absente. Mais néanmoins décevant pour Marshall.
  • “Hihihi peut être qu’elle a eut un point de côté ?”
  • “Ferme là, tu veux !” - Il arrêta le système d’aération de son casque pendant un cours instant, le froid pénétra ses poumons comme une série d’épines, mais son odorat ne détecta rien dans les parages
  • “Tant pis” - se dit-il
  • “Tant mieux” - le rectifia une voix et il traversa la brèche.
Le nouveau corridor était en pente descendante, plutôt raide d'ailleurs. L'inclinaison était d'environ 75° en moyenne avec quelques piques. Sans parler de l'irrégularité du sol qui demandait à regarder à chaque instant sous les pieds. Non pas que les pierres pouvaient les faire dégringoler, mais le chemin était quand même plus agréable en évitant de trébucher tous les 2 mètres.
La prudence rallongeait le chemin déjà conséquent. Ils descendirent si profond que l'idée d'être proches du centre de Meliacor ne paraissait pas si absurde.


Au bout d'une heure et demie de promenade sur la déclivité, les deux aventuriers se retrouvèrent au bout d’un précipice qui semblait ne pas avoir de fond. Cid poussa un sifflement impressionné en jetant un coup d’œil en bas. Cette chute pouvait potentiellement lui être fatale...
Non loin devait se trouver une cascade. Les capteurs auditifs étaient formels et de plus le son était facilement identifiable, cependant la source d’eau demeurait invisible. Refaire les stocks pouvait être une bonne idée, certes les armures filtraient tous les fluides; mais il y a quand même une quantité limitée de traitements possibles avant que le liquide absorbé ne devienne extrêmement dégouttant à boire et privé de tous minéraux essentiels.
  • On essaye de trouver la cascade ? - demanda Cid
  • Euh ouais pourquoi pas. Mon eau commence à se faire vieille - confirma Dalanda
  • Ok, je pense qu'elle est en hauteur - expliqua le félin en levant la tête pour confirmer qu'il ne disait pas de bêtises - Il y a une plateforme sur la droite, on va devoir escalader la paroi.
  • Je vois ça. C'est parti alors !


Cid saisit le mur d’une main et se tira facilement pour s’accrocher au mur. La scène donnait l'impression qu'il venait de soulever une plume du sol.


  • Je ne me lasse jamais de faire de la grimpette krru rru rru. Accroche toi – dit-il en tendant sa main.
  • Je peux le faire toute seule – répondit Dalanda. Elle sauta, pivota dans les airs, s’accrocha à une prise en hauteur, puis se hissa facilement pour avoir un appui agréable – tu vois, facile – annonça-t-elle toute contente.
  • Hmpf, ok alors suis moi miss Jane – répondit Cid en bondissant de paroi en paroi. Il s'arrêtait tous les 20 mètres pour vérifier que la jeune femme suivait bien derrière avant de repartir.


Toute cette histoire faisait remonter des souvenirs qu’il essayait d’oublier, des choses qu’il avait fait, des choses qu’il était sur le point de faire. Durant l’escarmouche contre les spectres il pouvait sentir sa rage pulser, demandant d'être libérée.  Si il avait cédé… L'idée même de cette éventualité le terrifiait.
Si il avait cédé s'aurait été la fin de tout... Cid jeta un regard en bas, observant longuement Eiling occupée à trouver des appuis. Quelque chose sur Meliacor réveillait les pulsions qu'il essayait désespéramment de garder emprisonnées. Des dispositions qu'il essayait de contenir sous des couches et des couches de contrôle... Néanmoins, quelque chose dans l'atmosphère ambiante le rendait dangereux pour elle.


  • “Hey Dalanda, à propos de mes insomnies…. ” - entendit il sa voix monologuer en réponse à son cœur lourd.
  • Jane ? Qui c’est ? – entendit il la question de Dalanda à travers leur intercom.
  • “…et de mes montées de colère,…” - continua sa voix dans la tête
  • Hmm si je devais l’expliquer qui est Jane - répondit Cid en continuant son ascension - Je dirai que….
  • “…mes histoires, mes problèmes…” - ne s'arrêtait pas sa voix
  • ... C’est la femme qui rencontre le tout premier zoohumain de l’histoire. Enfin je pense ? – expliqua Marshall, lui même incertain de sa réponse.
Le héros de l'histoire évoquée par Marshall, un beau récit perdu dans le cycle du temps, se comportait comme un animal mais était humain. Alors que les zoohumains sont considérés comme des animaux au comportement humain. Il y a une légère différence d'où le doute dans l'affirmation du félin. Mais au fond, oui, pourquoi pas  ?
  • “…c’est ce que j’ai toujours pensé…” - racontait sa voix
  • Attend une seconde, je pensais que c’était toi le premier - demanda Dalanda intriguée
  • “…avant de te rencontrer…”


Cid s’arrêta, accroché à la paroi. Les émotions commençaient à remonter des crevasses de son âme, et cette voix qui piaillait sans arrêt n'arrangeait rien à sa lutte. Il resta figé ainsi pendant quelques secondes, dix environ, avant de reprendre la route.
  • Cid ? Tu m'attends ?


En deux bonds il grimpa le long de la paroi et arriva, enfin, sur une plateforme. Pendante au dessus des abysses et recouverte de ruines. Des morceaux de pierres, des fragments de murs, des piliers brisés...
  • Oui je t'entends - répondit Cid en regardant la découverte archéologique qu'il aurait été ravi de réaliser dans une autre vie - Le premier hein ? C’est sujet à débat en fait. Je ne sais même pas si je peux réellement me qualifier de zoohumain… - répondit il pensif. Après tout il pouvait changer entre l'apparence humaine et son apparence hybride, ce que les autres étaient dans l'impossibilité de réaliser...
  • “…j’entends ces voix dans ma tête…”
  • ... Ou si j’appartiens à une espèce complètement différente - s'interrogea le félin.
  • “…j’ai l’impression de perdre pied…”


Dalanda ne dit pas un mot de plus, elle voulait respecter son passé et attendait juste qu'il décide de se livrer. Elle avait vu les images, cachées du public derrière le secret d’état. Pour tout le monde, les zoohumains étaient des mutants issus de l'intoxication des terres perdues durant la guerre contre les kissadzés. Des réfugiés qui s'étaient cachés dans les égouts avant d'être découvert par les autorités et installés dans des cités sociales. Les gens étaient prêts à gober n’importe quoi parce qu’ils n’avaient ni le temps ni l’envie de réfléchir.
Elle pu mettre la main sur quelques dossiers égarés et c'était dégouttant…Elle ne pouvait pas l’inciter à évoquer ces souvenirs. .


  • “…Je partirai…fuirai…après avoir sauvé ton fils…"
  • "Qui jacasse comme ça ?” - se demanda le félin en essayant de se montrer raisonnable, ouvert à la négociation.
  • Il y a des ruines ici – dit-il via l'intercom – on dirait que c’était une zone habitée.
  • Quoi ?? - demanda Dalanda étonnée. Pourtant elle n'avait senti la présence d'aucun fantôme.


  • “… je…”
  • “Ecoute tu me fatigue la tête alors tais toi, tu veux ?”
  • “…tiens…”
  • “TA gueule !”
  • “…à te dire…”
  • “...LA FERME !!!” - Sa main se dirigea vers son casque comme s’il avait l’intention de le fendre et d’en extirper la voix ou plutôt les voix à l’intérieur de sa tête.
Le félin dut cependant se rendre compte de la futilité de son geste avant de commettre l'irréparable. La seule résultante de sa pulsion allait être son suicide, et rien de plus. A moins de pouvoir palper l'immatériel, trifouiller dans la cervelle n'avait d'autre intérêt que de plonger dans sa tombe les deux pieds en avant. Alors, témoin de son geste erratique et ne sachant pas trop quoi en faire, Cid se gratta à nouveau le sommet du casque.


  • "Sigh, il faut que je trouve un moyen de me débarrasser de ces trucs" - se dit il en serrant et desserrant les poings à plusieurs reprises, testant la sensation de contrôle sur son corps. Reprenant ses émotions en laisse.
  • Ça va ? – lui demanda Dalanda qui avait senti une étrange vague émotive.
  • Oui, ça va. J'étais juste perdu dans mes pensées - répondit t il avec le souffle de nouveau régulier, maîtrisé. Pourtant il ne pouvait s'empêcher de revenir à cette étrange sensation. Comme si quelqu’un d’autre ascendait les marches de sa conscience.


  • Je vois…- répondit elle d’une voix qui trahissait de l’inquiétude. Elle doubla d'efforts pour grimper le plus vite possible, et ne pas laisser son ami tout seul trop longtemps. Une fois sur la plateforme, Eiling regarda autour d’elle, pour voir les restes d'un bâtiment conséquent. Son design faisait penser à un temple avec ses colonnes et ses ornements: des loups ou des chiens. Rien de tout cela n’était naturel et n'avait pas sa place sur cette plateforme, perdue au milieu de nulle part. Dalanda leva la tête et en ajustant le zoom de sa visière, et pu voir quelque chose d’intéressant – Il y a des bâtiments là-haut - annonça-t-elle.
  • Hmm ? - Cid leva la tête à son tour pour voir des minuscules bouts de murs – On y jette un coup d’œil j’imagine ?


  • Si c’est bien ce que je crois, alors la cascade ne devrait pas être loin - affirma Eiling sous postulat que les villes étaient en général battis à proximité des points d'eau - On trouvera peut être aussi des routes encore praticables, ça nous changera un peu de l'escalade. Par contre c’est vachement haut et ça n’explique que partiellement les débris ici-bas. Il y a peut être eut un éboulement…
  • Va savoir. On peut imaginer que ce temple romain flottait juste au-dessus de nos têtes amené ici par une distortion temporelle et qu’il a fini par tomber – dit-il en se rappelant les sphères qui flottaient toutes seules et qui semblaient soutenir le dôme dans lequel ils s'étaient séparés des mercenaires. .
  • Euh quoi ?


  • Le style architectural du temple. Il était utilisé sur terre par un peuple qui s'appelaient les romains, quelque part autour du 8ème siècle du vieux calendrier. Ce qui doit faire à peu près, il y a 5600 ans ? Non attend qu'est ce je raconte ? Hmm 6300 ? Bref dans ces zones là. C'est bien avant l'expansion spatiale. Les colonnes en surnombre étaient caractéristiques du style d'inspiration grecque...Bref, ça fait bizarre de voir une telle construction sur Méliacor - expliqua Marshall.
  • Comment tu sais ça toi ? Et ce n'est pas mézotopien comme style ? - demanda Dalanda en se rappelant ses cours d'histoire galactique.


  • Je te l'ai dis, j'étais professeur d'histoire à une époque.
  • Et j'ai toujours du mal à te croire - avoua Dalanda.
  • Hmpf, si tu veux. Quoi qu'il en soit, l'origine remonte à la Grèce mais possible que ce soit bien avant... Le style mézotopien c'est aussi des colonnes, c'est presque pareil en réalité. Cependant il existe des différences comme: une coupole au milieu de la structure. Trois accès au temple: avant, arrière et toujours à gauche tous en rampe de 24 marches. Trois colonnes libres, toujours. Un mur circulaire autour du temple, toujours, du moins je crois. Les statues aussi, la taille,  mais on s'en fou de tous ces détails.


  • Je vois - répondit Dalanda  - En tout cas ta théorie a le mérite d’être intéressante... Mais l'autre Ulwazi c'était mézotopien du coup ? - demanda la jeune femme en se rappelant les coupoles dorées.
  • Ouais. Il y a clairement une inconsistance historique. Beaucoup de choses ne collent pas du tout, des variations étranges que je ne peux m'expliquer. mais plus j'y pense plus l'inconsistance m'embrouille - réfléchit Cid à haute voix.
  • De quoi tu parle ? - s'intéressant Eiling.
  • Je parle de dates. Je parle de présence humaine avancée sur d'autres planètes. Je parle de l'existence des Ulwazi qui remontent à combien ?
  • Aucune idée, il est impossible de les dater...
  • Exactement. D'où vient cette technologie ? D'où vient ce savoir ? De notre époque ? Des romains qui avaient à peine des routes ? Il y a clairement une inconsistance. Mais ce n'est pas en se posant des questions inutiles qu'on va avancer pas vrai ?
  • J'imagine oui - conclu également Dalanda qui savait aussi quelque chose ne collait pas. Néanmoins qu'est ce que cela pouvait bien changer à leur problèmes ? - Où tu vas ? – demanda-t-elle alors que Cid commençait à déblayer un passage poussant au besoin les débris sur son chemin – Pourquoi est-ce que j’ai un mauvais pressentiment tout d’un coup ?
  • Aucune idée – répondit Cid en toute innocence.
Il y avait quelque chose de particulièrement inquiétant chez le félin en train de calmement déblayer une sorte de piste.
  • Attend une seconde, avant que tu ne proposes quoi que ce soit je vais regarder si je n’ai rien qui pourrait nous aider. J’ai cru voir des piques et une corde tout à l’heure – dit Eiling pleine d’espoir. Elle savait que ce qui mijotait dans l'esprit de son garde du corps n'allait pas être une sinécure.
  • Ok, prend ton temps – répondit Cid en continuant son ménage.


Au bout d’un quart d’heure la piste était prête, s’étendant d’un bout à l’autre de la plateforme et remontait sur une partie de ce qui devait être la cella (l'arrière/sanctuaire) du temple en ruine. Un allez sans retour en direction du gouffre
  • Alors ? – demanda Marshall via l'intercom. Il était debout sur un pan de mur, les bras croisés, la queue remuant lentement sans directions précises, les yeux rivés sur la paroi à grimper.
  • Alors, alors ! Je n’ai qu’une pioche et une corde – fulmina Dalanda en les levant au ciel, à la limite sur le point de les jeter furieusement au sol.


  • Déjà le fait que tu ais une pioche dans ce foutoir est impressionnant – Répondit Cid en jetant un regard derrière lui pour voir la silhouette de son amie. Il rigola un coup puis continua son observation. La tentative était risquée, la roche en face était trop friable pour ce qu'il avait en tête. Cependant... - C'est une pioche en quoi ? - demanda t -il.
  • En nimbus - répondit Dalanda en jetant un coup d’œil à l'outil pour être sure de ne pas dire n'importe quoi. Il s’agissait d’une pioche d’expédition en alliage de titanium et de nimbus, extrêmement solide, et pouvant supporter plusieurs tonnes sans problèmes.


  • Hmpf, réellement un sac magique qu'on a là.
  • Ah ne te moque pas, je n’ai pas eu le temps de tout préparer correctement.
  • Nan je suis sérieux. Ça te servira pour la montée.
Elle poussa un gémissement suivi par un soupir résigné.


  • Vas-y, dit-moi ton plan – demanda-t-elle.
  • C’est simple, je te jette de l’autre côté – expliqua le félin.
  • Je ne suis pas super emballée par cette idée. Je sais que tu es anormalement costaud mais fournir une poussée suffisante pour lancer une armure de plus de 300 kilos sur deux cent cinquante mètres…
  • Je ne fournirai rien du tout, je te jetterai de l’autre côté simplement. Et puis il me semble que c’est 750 kilos non ?


  • Ne chipote pas sur les chiffres ! – rétorqua-t-elle.
  • Ah parce que tout à coup le poids n’est plus le problème ?
  • C’est la distance le problème, on parle de deux cent cinquante-cinq mètres en longueur. C’est de la folie ! - commenta Dalanda en levant les bras au dessus de la tête
  • Je te rassure je ne serai pas le seul dans l’effort, et si tu as une meilleure idée je t’écoute.
  • On pourrait…
  • Trop tard – répondit-il en identifiant une zone qu'il estimait suffisamment solide pour recevoir la charge. L'angle allait être compliqué à atteindre mais pas impossible.
  • Écoute-moi non d’un chien !! - rugit Eiling. Elle n'était pas du tout emballée par cette idée, mais vraiment pas.
  • Je t'écoute - répondit Cid - Quel autre plan as-tu en tête ?
  • Je ne sais pas. Je ne sais pas ! Mais ça ne veut pas dire que ton idée est bonne ! - argua la jeune femme.
  • Je n'ai jamais dit qu'elle est bonne. Je soutiens par contre qu'elle est réalisable. Je peux comprendre que tu aies peur, mais je te rappelle encore que je suis sensé te protéger. Et jusque là je pense avoir fait du bon boulot
  • Ou tu veux en venir ? - demanda t elle. Là en ce moment, les deux arguments n'avaient absolument rien à voir. Ce n'était pas qu'elle avait peur pour sa vie, mais simplement, quelque part, cette idée était dangereuse. Rien à voir avec le manque de confiance.
  • N'essaye pas de gagner du temps et va te mettre en position. Nous avons un bond à faire kruu rru rru - rigola le félin
  • Tssk ! - claqua t elle des dents, frustrée de ne pas trouver d'arguments ou d'idée.

  • Tu as suffisamment de place pour prendre de l'élan ensuite hop. Tu te retrouveras de l'autre côté avant même que tu t'en rendes compte - expliqua Cid accompagné d'une gestuelle explicite à l'aide de ses deux doigts.
  • Ah et puis merde ! Je vais le faire. Ouais je vais le faire ! - annonça Dalanda en prenant la pioche et la corde qu’elle enroula autour de son épaule gauche et sa hanche droite – le sac c’est toi qui le prendras !!
  • Ouais c’était le plan - confirma le félin.
  • Ok, ok !!


La jeune femme recula le plus possible, se mit en position de sprint en attendant le signal.
  • Cid ? - demanda t elle en testant ses appui sur le sol. Les indicateurs de l'armure étaient dans le vert. Au besoin elle avait le propulseur dorsal ainsi que l'oveclock qu'elle n'aimait pas du tout. Trop dangereux à son goût.
  • Hmm ? - répondit Cid qui se mettait également en position
  • Je te fais confiance tu le sais ça ? - s'enquit Dalanda. Même si elle savait qu'il savait mais cela ne coûtait rien de le rappeler, surtout maintenant d'ailleurs.
  • Oui je le sais. T'es prête ? - se renseigna le félin
  • Oui, je suis prête - confirma Eiling avant d'appeler à nouveau - Cid ?
  • Hmm quoi encore ?
  • Tu es sur que tu peux faire ça ? - encore une fois ce n'était pas par manque de confiance. Mais on parlait quand même de deux cent cinquante mètres.
  • Je pensais que tu avais une entière certitude en mes capacités - demanda Cid amusé par les craintes de sa protégée. Amusé mais également agacé par cette remise en question.

  • Ouais mais bon, la confiance n'exclue pas le contrôle - expliqua la jeune femme
  • Kruu rru rru, pas faux - admit le félin en écartant les jambes. Il avait besoin de se focaliser, d'écouter son corps, de puiser dans une partie de ses ressources.
  • Cid ? - voulu-t-elle gagner encore un peu plus de temps.
  • Une fois de l'autre côté tu rentre la pioche aussi fort que tu peux - expliqua le félin. La roche friable était dangereuse et pouvait avoir le même comportement que du sable. Même si elle essayait de s'y encrer, le mouvement issu de la fracture des liaisons maintenant les éléments ensemble, provoquerait une réaction en chaîne. La pioche et sa propriétaire avaient de fortes chances de se retrouver dans le vide. Mais face à une paroi solide, la situation était différente. Elle pouvait faire preuve de force pour solidifier sa prise sans peur de tomber avec une partie de la montagne.
  • Ok !
  • GO ! - hurla Marshall en espérant ne pas s'être trompé dans ses calculs. L'essentiel était juste de l'envoyé de l'autre côté, ensuite, il était certain qu'elle pourrait se débrouiller.
Dalanda prit une profonde inspiration, coupa la radio pour ne pas que son compagnon l’entende pousser des jurons et des menaces à son égard. Elle fit ensuite le vide dans son esprit et se rua vers son objectif. Marshall, fléchi en présentant ses mains suffisamment bas pour ne pas casser le rythme de la course.
Lorsqu'elle posa le pied sur les paumes du félin elle eut l'impression de marcher sur un bloc métallique, immuable, infrangible. Cette sensation effaça tous ses doutes alors qu'elle fut projetée soudainement au dessus du vide. La sensation était fortement désagréable entre le cœur qui donnait l'impression de s'être barré dans les talons, la nausée et la pression qui bloquait la circulation sanguine.

Les muscles de Marshall étaient bandés à l'extrême, au point où ses veines apparurent à la surface de sa fourrure gonflées par l'afflux de sang. Il serra les crocs durant l’effort si violemment qu’il crut entendre l’une d’entre elle se casser mais il s’aperçu que ce n’était que son imagination.

Il la projeta ni trop fort pour ne pas qu’elle percute le mur et perde tout chance de s’agripper à la paroi, ni trop faiblement évidemment et suivant un angle suffisamment élevé pour lui faciliter la tâche. C'était cet équilibre qui était le plus difficile à réaliser, et qui demandait énormément de concentration et d'efforts. L’armure et son occupante furent catapultés juste avec ce qu’il fallait de contrôle pour les envoyer pile sur la surface solide.

L'idée d'enclencher les propulseurs ne lui traversa même pas l'esprit. La paroi se rapprochait suffisamment vite à son goût, trop vite. Elle avait l'impression d'être à la limite de la barrière sonique et l'impact sur son corps était pratiquement insoutenable.

Une fois à portée de bras de la falaise, elle luta contre sa vélocité et la pression atmosphérique venant en sens contraire, pour lever la main et planter sa pioche de toutes ses forces. Cette dernière s'enfonça de plusieurs centimètres dans le mur de pierre lui offrant une solide accroche à laquelle elle se cramponna fermement.

  • Wouhou !! – s’exclamât-elle en lui faisant signe que tout était ok. L'adrénaline était pompée à flot dans son sang.
Marshall était essoufflé, la nature explosive de l'effort l'avait mis sur les rotules. La charge sur son métabolisme fut particulièrement importante, au point où il sentit de légères palpitations au cœur. Cependant son organisme était des plus particuliers, façonné pour être l'épitome de la résilience. Même ses troubles pulmonaires entraînés par le froid de Meliacor n'étaient désormais qu'un mauvais souvenir.

  • Eh bien on dirait que ça t’as plu au final Kruu rru rru – rigola Cid en prenant de profondes respirations. Il fermait et ouvrait les mains fortement et lentement pour réguler sa circulation sanguine. Ce n'était pas réellement un geste nécessaire d'un point de vue physiologique. Ce n'était pas pour pomper le sang d'avantage, cela aurait été suicidaire, pouvant résulter en une rupture aortique. Mais plutôt un geste qu'on pourrait qualifier de routine autogénique pour limiter le stress sur les muscles et la structure osseuse. La lenteur du mouvement était au contraire, pour se détendre et se focaliser sur chaque partie de son corps individuellement, régularisant progressivement la pression sanguine: lobe temporal, trapézoïdes, deltoïdes, biceps, triceps, brachioradialis, pectoraux, abdominaux...De la cime des poils sur les oreilles, jusqu'aux plantes des pieds sans oublier les organes. Une technique appelée: La relaxation progressive de Jacobson.

  • C’était aussi fou que je l’avais imaginé ! – avoua Eiling. Traverser un gouffre sans fond visible et de cette manière était particulièrement effrayant et paradoxalement excitant.
  • On remettra ça alors - promis Cid en souriant. Le procédé était terminé, son souffle était régulier et son corps en top condition comme si rien ne s'était passé.
  • Euh non, non ! Je ne pense pas non ! - protesta Dalanda. Une fois était une fois de trop pour cette attraction.

Cid jeta un coup d’œil en bas et fut prit d’un fou rire. Une scène c’était développée dans son esprit en le prenant par surprise.

  • Qu’est ce qui se passe ? – demanda Dalanda intriguée et inquiète de l'état mental de son compagnon.
  • Haha, non…Haha, j’ai juste imaginée une scène qui m’a fait marrer.
  • Ah ouais ? Raconte !
  • Alors je me suis imaginé en train de prendre mon élan et tout. Moment sérieux, scène au ralenti, pleine de tension. Je prend mon élan, foulée parfaite et au dernier moment je glisse direct dans le trou et je fais une de ces têtes. Haha, gros yeux qui sortent des orbites et tout le délire…
  • NON MAIS CA NE VA PAS ? TU TROUVE CA MARRANT ? – hurla Dalanda. Dejà elle était inquiète de savoir comment Cid allait la rejoindre, alors cette image plus que possible était un cauchemar pour son imagination.

  • Non mais il faut imaginer, tout est dans l'expression du visage - essaya d'expliquer Cid en revoyant sa tête cartoonesque
  • CE N’EST PAS MARRANT !! RAMENE TOI ET SANS TOMBER !!! - ordonna la jeune femme.
  • “Erf c’était un court délire” - se dit le félin en se grattant le casque.
  • “Hihihi, moi j’ai trouvé ça marrant”
  • “... T'es encore là toi ?” - s'étonna Marshall même si il n'avait pas de raisons de l'êtres. Cet aspect de sa personne n'allait pas disparaître comme par magie.
  • "Hihihi bien sur"
  • "..."
  • “J'ai bien aimé, surtout la mâchoire écarquillée. Ça nous donne un air plus crétin que d’habitude”
  • “Comment ça crétin ?”

  • “Hihihi c’est vrai, c’est vrai hihihi”
  • “Par contre la deuxième scène est moins marrante”
  • “Quelle deuxième ?”
  • “Celle où on se transforme en crêpe à la confiture de fraise”
  • “…Ok fermez-la ! Foutez moi la paix ! Merde ! On ne peut même plus se marrer en paix et puis bordel de merde je discute encore tout seul” - fulmina intérieurement le félin
  • Tu viens ?! - demanda nerveusement Dalanda - Tu veux que je sorte la corde ??
  • J’arrive ! Et oublie la corde. Tu m'as prit pour qui ? - répondit Cid. Néanmoins, il ne pouvait s'empêcher de se demander si ses pattes allaient pouvoir absorber toute la friction ou s'il allait y perdre ses coussinets.
Cid jaugea encore une fois la distance, il y avait 257 mètres à franchir et vingt-six mètres pour prendre de l’élan.
  • “Largement suffisant, pour sauter deux terrains de foot. Kruu rru rru, si un jour j’avais pu imaginer ça…” - pensa-t-il mais son rire intérieur n'était pas vraiment un rire de confiance. Il savait qu'il allait devoir affronter une force sur laquelle il n'avait que peu de contrôle, un élément physique qui s'appelait la friction et avait une puissance proportionnelle à la sienne.

Il rebroussa chemin, le sac fermement fixé, et se mit en position de sprint. Presqu' allongé au sol, les doigts fermement enfoncés dans la pierre, les pattes arrières ancrées prêtes à le propulser comme des ressorts, tous les muscles relâchés avant l’effort mais prêts à lui fournir cette énergie explosive dont il aura absolument besoin. Son plus grand ennemi, sa némésis dans cette épreuve était cette force invisible à laquelle le commun de mortel ne portait nulle attention. Pour la comprendre de manière simple, il suffit de placer une paume sur votre avant bras et frotter légèrement. Vous sentez la peau s'irritez, maintenant accélérez le mouvement et vous sentez de la chaleur.

Vous pouvez protéger votre peau par des vêtements ou des chaussures mais là encore, la force du frottement rentre en conflit avec la résistance du tissu ou du caoutchouc. En règle général plus les valeurs sont élevées et plus les matériaux cèdent et se désagrègent. Ici, pour ce saut en longueur, respecter l'existence de la friction était tout simplement indispensable et les seules choses qui allaient pouvoir absorber l'impact, ainsi que l'énergie cinétique produite, étaient ses coussinets.

Peujo, son armure, avait une fonction particulière. Une fois Cid à l'intérieur elle ouvrait le bas des pattes pour laisser ses coussinets à l'air libre. En règle général, les coussinets des félins étaient particulièrement sensibles aux températures et Meliacor était une immensité glacée aux températures invivables. Rien que de penser à marcher aurait du être un véritable enfer pour le tigre, néanmoins cela était différent pour cette bête-éprouvette. Ses coussinets absorbaient l'énergie cinétique ainsi que les chocs, une fonction indispensable pour ses prouesses physiques, au détriment de la sensibilité nerveuse. Ces parties de son anatomie étaient comme des zones mortes, des récepteurs noires...

Marshall se lança un compte à rebours dans la tête de dix secondes, progressivement tout se dissipa devant ses yeux si ce n’est cette ligne qu’il devait parcourir, et progressivement il programmait ses mouvements à l’avance dans son esprit car tout allait se passer très vite. A la fin des dix secondes il se tira vers l’avant avec ses bras tout en se propulsant avec ses pattes, atteignant la moitié de sa vitesse maximum en un instant. Ses coussinets tenaient le choc, cumulées à une technique de déplacement rapide imposant la baisse de son centre de gravité. Chacune de ses foulées laissait une profonde empreinte dans le sol comme si un colosse de la taille d'une montagne s'était baladé par là.

La plateforme défila en quelques battements de son cœur hyperactif
  • “Hihihi tombe !” - rigola la voix
Le félin hésita, l'image de son corps tombant pour l’éternité fur injectée dans son esprit.    
  • "Putain !!" - ragea intérieurement le félin en serrant les crocs ainsi que ses sphincters.

Marshall se propulsa à deux ou trois centimètres du précipice, explosant une bonne partie du mur de la cella sous l'immense pression. Son hésitation eut un impact négatif sur son bond qui s'avéra malheureusement trop court, il pouvait déjà sentir le froid des abysses l'enlacer comme une amante. Dalanda l’ayant remarqué lui jeta la corde mais il passa à côté tombant dans les abysses.

  • Cid !!! – hurla-t-elle complètement verte de peur.
En réponse aux appels de la jeune femme, il y eut un bruit qui lui glaça le sang.  Un rire presque hystérique: Rraa rra rra rra rra !! Rraa rra rra rra rra !!!
  • Cid !! Cid !!- appelait Dalanda mais elle ne pouvait couvrir le bruit des esclaffes qui raisonnaient comme des grondements de tambour dans ses oreilles - "Je plains le docteur Willmann" - pensa t elle ensuite en continuant à grimper. Cid était vivant, c'était l'essentiel. Mais à force de l'entendre rire elle commençait à s'agacer en attendant comme une conne qu'il lui réponde.

Plusieurs mètres plus bas, Marshall avait les mains littéralement plongées dans la montagne, jusqu'aux biceps. Le flanc de la falaise s'était effrité sous le contact agressif du métal, et il avait dû se battre comme un acharné durant la glisse pour retrouver le contrôle.
  • Oh putain ! j’ai eu chaud au cul là ! krru rru rru - Ria-t-il en revenant à ses sens, étouffant l’excitation morbide qui faisait battre son sang comme des cymbales dans ses tympans.
  • J'ai vu ça - répondit Eiling en cherchant un nouvel appui.
  • Krru rru rru et c'est tout ce que ça te fait ? - demanda Cid
  • Je t'ai jeté la corde, je pense avoir fait ma part - répondit la jeune femme. l'impact émotif n'était plus là. Comme qui dirait : le train avait quitté la gare.
  • Krru rru rru pas faux. Mais je ne pouvais pas la prendre sans te faire tomber – précisa le félin avant d'avouer – et puis c’était comme qui dirait un défi entre moi et la nature.

  • “Hihihi on va remettre ça à l’occasion” - rigola sa voix
  • “Oh toi !! T’es complètement barré ! T'as failli nous faire tuer !!” - rugit intérieurement le félin. Si cette image n'avait pas été injectée dans son esprit, il aurait traversé le gouffre sans problèmes.
  • "Hihihi quelle diva ! Non je n'ai rien failli, pas encore hihihi" - averti la voix avant de se fondre à nouveau dans l'obscurité de son subconscient.
  • "..."
  • Un défi ? T'es sérieux ? J’ai failli avoir une crise cardiaque !! - réprimanda Dalanda son compagnon.
  • Meuh non, t’est trop jeune pour ça – répondit Cid déjà à sa hauteur – Allez hop ! – il commença à bondir en plantant ses doigts dans la roche et creusa rapidement la distance.
  • “ARGHH !! Il me rend fou !!!” - hurla-t-elle intérieurement.

Dalanda se mit à grimper à l’aide de la pioche qu’elle plantait en premier pour se hisser, ensuite elle frappait la roche du pied pour se créer un appui et ce de manière systématique. Elle avait opté pour une approche plus sécurisée étant donné l’état actuel de ses nerfs, une erreur était si vite arrivée.

La paroi qu’ils devaient escalader s’étendait sur un peu plus d’un kilomètre, ce qui à son rythme léger devait lui prendre une bonne heure, voire une heure et trois quart. L'ascension n'était pas difficile, juste chronophage.

Une fois au sommet, Cid  lui tendit la main pour l’aider à se hisser. Elle voulut refuser, encore sous le coup de la colère, mais se rendit compte que c’était puéril. Le félin la souleva sans efforts, puis la reposa  aux abords d’une ancienne cité en ruines, visiblement ravagée par un cataclysme.

  • Comment tu te sens ? - demanda le félin
  • Ça à l'air d'aller, pour l'instant du moins – répondit Dalanda. Il n’y avait pas de “fantômes” ici. Ils ont du se lasser d’attendre un hôte.
La cité noyée par des pierres gargantuesques étaient complètement muettes. La température était supportable, du moins selon les critères de Meliacor. Elle était parmi l'une des plus basse trouvable en extérieur: -10°c. Dalanda ouvrit l'avant de son casque et ferma les yeux pour éviter un contact trop soudain entre le corps vitré et la brise d'air froid qui lui piquait la peau du visage.
  • T'essaye de communier avec la nature ? Kruu rru rru - rigola Cid en remarquant son geste.


La jeune femme referma ensuite le casque, désormais persuadée qu'il n'y avait plus rien dans cette ville. Aucune trace d'une vie même dans cet au-delà émotionnel qu'elle pouvait frôler de ses sens.  
  • Non, j'ai cru sentir des murmures, mais ce n'était que mon imagination - répondit Eiling, triste. C'était pesant d'être au milieu d'un champ de mort. Surtout d'une mort signifiant: absence de tout. Rien n'avait perduré, tout avait disparu...
  • Hmm, ok. J’ai repéré un endroit pas loin pour installer un camp – annonça Cid. Etant arrivé en premier, il avait décidé d’opérer une reconnaissance des lieux pour ne pas perdre de temps. La fatigue commençait à se faire sentir.

  • Ok, tu peux t’occuper de l’exploration après ? Si on peut déjà avoir une idée du chemin jusqu'à la cascade ce serait bien. Je bois du jus de chaussettes là, c'est dégueulasse - demanda Dalanda. Ces ruines l'intimidaient, ce vide était de mauvaise augure alors elle voulait traîner le moins possible dans les environs.
  • C’est prévu. Par contre j’aurai besoin de la nano pâte, j’ai toujours cette impression de forcer mes déplacements - annonça Cid en tourbillonnant l’épaule droite
  • Je n'en ai pas beaucoup avec tes spécifications tu sais, alors essaye de préserver ton armure.
  • Hey ! Je m’y emploie malgré les apparences. Mais vu le rodéo de notre séjour ce n'est pas si simple - se justifia le félin en prenant un ton outré.
  • Donc j’imagine que percuter un véhicule qui doit faire trois fois ta taille sans parler du poids est justement un moyen de préserver ton armure ?

  • ...Kruu rru rru. Sur le coup ça m’a semblé être une bonne idée. Un duel dans la neige entre moi et le colosse de métal, s’en était presque poétique - rigola Marshall.
  • Poétique ? Seigneur !! Regarde tu me fais devenir croyante - répondit la jeune femme drainée de sa patience.
  • Ce n’est pas plus mal que l'un d'entre nous ai la fois krru rru rru. va savoir peut être que tu pourra même manipuler Dieu lui même et nous donner de la chance.
  • Arrête de raconter n'importe quoi. Je suis trop crevée pour t'écouter.
  • Aouch ! - fit le félin en mimant de la douleur dans la poitrine - Ok ! tu en as combien du coup ?
  • De nanopate ? Trois, au dernier compte.
  • Hmm mouais…Pas beaucoup. Et tu sais tu as combien de pièges dans ton sac magique ?

  • Attends, laisse moi réfléchir - demanda Dalanda. La fatigue commençait à altérer ses capacités cognitives.
  • Vas-y prend ton temps - la rassura Cid en ralentissant un peu le pas.
  • Je crois qu'on a cinq capteurs électriques et trois mines, mais il vaut mieux vérifier...
  • On le fera tout à l'heure, rien ne presse.
  • Tu penses qu’on en aura besoin ? - demanda Dalanda avec une pointe d'inquiétude. Surtout qu'elle ne voyait pas ce qui pouvait être facteur de danger au milieu de ce désert de pierre.
  • Je ne sais pas, met le sur le compte d'une déformation professionnelle - expliqua Cid. Sa carrière l'avait fait passé par les "Lyon aegis", des commandos spécialisés dans la recolonisation. Là bas, dans les terres "nouvelles", tout pouvait arriver... - Au pire on aura joué la sécurité, ce qui n'est pas plus mal vu qu'on restera là un bon moment.

  • Je ne sais pas si c’est une bonne idée de prendre notre temps ici… - essaya de protester Dalanda
  • C’est l’occasion ou jamais de se reposer un petit peu et de se repositionner sur une carte. En se précipitant on risque de perdre plus de temps ou pire. Il vaut mieux ne pas se perdre pas vrai ? - expliqua Cid
  • ...
  • Ne t'inquiète pas. Il n'y a rien en ce monde que je ne puisse affronté Kruu rru rru - rigola Cid en gonflant ses muscles qui firent grincer le métal de l'armure.
  • Hmpf, c'est vrai - admit Dalanda en souriant - "C'est vrai"...

A quelques kilomètres de là, un vaisseau parcourait expertement les tunnels de Meliacor. A son manche: le sergent Jonathan Bender, accompagné de sa nouvelle équipe de spécialistes. Des monstres selon les standards humains. Ainsi que de plusieurs réservoirs de g0t0n7. Ils savaient exactement où aller, comment agir, et comment tout allait se terminer.
Dans la soute, Sparrow, en compagnie de son colosse de métal, lisait paisiblement sans une once d'inquiétude.

  • Si ça te dis on peut camper à la périphérie de la ville - suggéra Cid. L'idée ne lui déplaisait pas particulièrement. Le repos pouvait attendre encore un petit peu.
  • Non ça ira, c’était juste une angoisse - répondit Dalanda en essayant de reprendre le dessus sur ses émotions. Ses nerfs avaient été trop stimulés par tout ce qui leur était arrivé jusque là et la fatigue n'arrangeait rien à cette surexcitation d'épuisement, où les sens sont en alerte constante et le cerveau produit toutes sortes de théories dans l'idée de créer la peur et maintenir cet état de veille . Autrement dit elle avait besoin de s'asseoir et de faire un somme - Alors où est le palace ?

  • On est presque arrivé - annonça Cid
  • Tu crois qu’ils pourraient nous retrouver ici ? - demanda Dalanda en contournant un rocher qui faisait sa taille, et qui bloquait les 3/4 d'une ruelle.
  • La chose ou les types en camouflage ? - demanda le félin en retour.
  • Je pense qu’il y a un lien entre eux - répondit le jeune femme pensive
  • Possible. Très possible mais sans preuves ce n’est que spéculation. Hmm est ce qu'on est tranquille ? - cogita Cid à haute voix - C'est tout à fait possible. Il suffit qu'ils soient coordonnés et disposent de bons pisteurs. Après tout, je ne pense pas que nous soyons très loin de leur base. Il est également possible que l'existence de cette cité ne leur soit pas inconnue. Ils ont des archéologues après tout. Archéologues et ruines vont souvent ensemble pas vrai ? Kruu rru rru. Je dirai qu'on a une bonne journée d'avance, alors on peut être tranquille - conclu Marshall. Même si il avait été très large dans son estimation. Les humains étaient tellement fragiles par nature, inutile de les accabler de soucis et de poids inutiles. Il était là pour ça après tout... En réalité ils devaient avoir une mi journée de tranquillité si jamais les black owls avaient décidé de les poursuivre. Mais si tel était réellement le cas alors il était prêt à les recevoir comme il se devait. La ville était grande et parfaite comme terrain de chasse. Même une armée ne saurait lui tenir tête au milieu de toutes ses ruines pour se cacher !

  • Une journée ? Je n'imaginais pas qu'on avait autant de temps, c'est super - répondit Dalanda soulagée. Elle ne se voyait pas courir et affronter d'autres spectres. La peur qu'elle avait ressenti après coup, après que l'adrénaline ait été évacuée de son système, pouvait être comparée à une poigne lui serrant le coeur. La peur était douloureuse, et l'avait rendue fébrile comme durant une forte fièvre. Mais comment pouvait elle le montrer devant Cid ? Il s'en moquerait pour tout le restant de sa vie...


Les deux compères marchaient au milieu d’un monde recouvert de roches avec quelques bouts de bâtiments miraculeusement intactes. Des bouts de murs sphériques, des toits arrondis, des bouts d’immeubles circulaires détruits, de branches d’arbres fossilisés faisant coucou. Le tout sous un dôme à peine visible dont il ne restait qu’une partie de l’infrastructure. Le reste avait été anéanti par le cataclysme.

Il ne fallait pas être un génie pour comprendre ce qui c’était passé ici bas. Pour une raison inconnue leur ciel s’était décroché, les baignant d’une pluie de pierres et de roches qui enseveli cette civilisation. Certaines de ces pierres avaient même la taille de petites montagnes, ils pouvaient en voir une au loin, trônant au dessus des quelques rescapés de béton.

Peut-être un tremblement de terre avait fait détacher une pluie de pierres du plafond de cette caverne aux proportions gargantuesques. Rien qu’imaginer le cataclysme donnait des sueurs froides. La terreur devait être inouï, suffocante... Voir le ciel tomber sur la tête, voir les gens mourir écraser. Amis, famille, aimés, inconnus... voir cette mort instantanée en se disant qu'on était les prochains. Peut être même que le sol s'était écarté en les engloutissant en un instant, alors qu'ils étaient là, à porté de main. Le désespoir, les cris, les pleurs, la folie, l'impuissance, l'abandon... La nature reprenait son du, sans émotions, sans hésitation. Et les premiers signes de la catastrophe avaient du être une légère secousse...

La tragédie avait commencé par une oscillation, sans doute légère. Peut être était ce le matin annonçant un réveil brutal. Ou peut être était ce dans la bousculade de la fin d'après midi. Mais aux premiers signes de vacillement de la croûte terrestre; toute la ville avait dû s'immobiliser dans un même souffle. Véhicules, piétons, bureaucrates, mêmes ceux qui se soulageaient aux toilettes avaient du s'arrêter en attendant la suite.

Le son des cœurs battants d'anxiété devait remplir l'air de la cité, comme des mini tambours joués par des artistes enflammés par le rythme. Les regards devaient se croiser, les questions devaient être posées, peut être même de la libération devait être ressenti en l'absence de suite. Jusqu'aux premières gouttes sur la surface du dôme. Des gouttes sous terre, qui firent lever les yeux vers cette anomalie.

Le tremblement ne venait pas du sol, mais du plafond. Les vibrations s'étaient propagées dans la roche jusque sous leurs pieds. Mais le danger venait du ciel de plusieurs mégatonnes. Ils avaient du entendre des tic par ci, toc par là, hérissant les cheveux sur la tête. Les plus rationnels avaient peut être pensé que le dôme allait résisté, après tout il avait été construit avec ce risque en tête pas vrai ? Les plus sceptiques devaient probablement sprinter chez eux comme des damnés pour plier bagage avec ou sans famille.

Tic toc, tic toc, bam, bam, boum, boum... Le dôme résistait aux premiers assauts. Avaient ils, ressenti du soulagement ? Avaient ils eut le temps de recevoir des consignes d'évacuation ? Où le désespoir s'était il abattu sur leur tête comme une furie déchaînée ?

Les bam et les boom, avait du se transformer en crac et en Ahhh !! Les premiers hurlements de paniques aux premières fissures dans la voûte de verre. La ville qui s'était arrêtée courait désormais dans tous les sens comme un poulet décapité. La survie avant tout, mais encore une fois c'était un peut être. L'histoire était reconstruite par Cid en fonction de son bagage de croyances et certitudes. En fonction de ce qu'il savait et croyait savoir de ce monde complètement fou.

Le désespoir de ces personnes écrasées, piétinées, abandonnées, apeurées... Le sentiment de ces personnes qui tombaient à genoux en demandant "pourquoi" au ciel, et attendant la fin. Ces émotions étaient reconstruites par son subconscient, à travers ce qu'il avait éprouvé un jour. Raison pour laquelle une larme coula le long de sa joue: solitaire, fuyarde, mélancolique...

  • “Hihihi la pleurnicheuse” - se moqua la voix
  • "Pas maintenant !” - gromela Cid qui ne comprenait pas lui même d'où venait la fuite.
  • “Hihihi ce devait être un spectacle intéressant. Surtout les cris, hmm les cris. Tu crois que ...”
  • “Dégage !!” - rugit il intérieurement en faisait un effort colossal de volonté  pour imposer le silence.
  • "..."

Combien de temps avait du s'écoulé depuis lors ? Des décennies ? Des siècles ? Voire des millénaires ? Combien de temps il fallait pour que les émotions d'une telle magnitude se désancrent et fondent dans le néant. Combien de temps il fallait pour que les fantômes se lassent d'attendre ? Probablement des siècles, probablement bien avant le début de la conquête spatiale. Certainement bien avant la colonisation de l'espace par les terriens. Méliacor était indéniablement une civilisation humaine mais non terrienne. Il n'y avait plus de place au doute pour le félin, sa théorie n'était pas si folle... Une énigme enveloppée de mystères s'étalait à perte de vue. Autrefois il se serait jeté en quête de réponse, autrefois les réponses avait une utilité, autrefois oui...


  • Ce n’est plus très loin – rompit, Cid, le silence
  • Tant mieux je commence à fatiguer – avoua Dalanda. Malgré l'aide des servomoteurs, elle sentait ses jambes lourdes au point où chaque pas devenait de plus en plus dificile.
  • C’est ça de rester toute la journée devant un bureau – la nargua le félin.
  • Les idées ne se mettent pas toutes seules sur écran. Et puis j’ai un grand projet pour le futur.
  • Ah ouais ton truc là ? “Blues road” ?
  • Blues ? Non c’est “blue road”
  • Si tu veux ! Le nom est ridicule par contre et cette anglicisation culturelle...Pff !
  • De quoi tu parles ? - demanda Dalanda qui ne voyait pas du tout de quoi il était question.
  • Laisse tomber c'est moi qui divague - soupira Cid en sentant que l'explication allait être compliquée, très compliquée.
  • J’ai beau essayé je n’arrive pas à t’imaginer professeur - déclara Eiling - c'était une couverture ? Allez tu faisais quoi avant d’être...enfin avant - demanda Dalanda
  • On est arrivé - répondit Cid sans prendre la peine de répondre. Le duo se retrouva devant un immeuble que devait ressembler à une tour, actuellement fendue en deux quelque part au trois quart et dont il ne restait que quatre étage
  • On s’arrêtera au troisième, on aura une bonne vue sur les alentours tout en ayant une voie de secours facile – dit Cid en sautant au deuxième puis au troisième. La jeune femme le regarda faire, elle n’avait aucune envie d’escalader quoique ce soit alors elle chercha une autre solution: des escaliers internes ou de secours. Les marches qu’elle trouva étaient rompues, mais rien qu’un saut ne pouvait franchir surtout avec un propulseur dorsal.

Dalanda entra dans la chambre. La seule qui disposait d'une porte encore utilisable, rongée par le froid et le temps. La pièce n'était pas très grande, peut être était ce différent dans le passé lorsque l'immeuble ne faisait qu'un. Cependant, en l'état actuel, il n’en restait qu’une vingtaine de mètres carrés. La première chose qu’Eiling remarqua en entrant dans cet appartement était une photo encadrée de marbre affichée dans le couloir. De ce que la jeune femme savait, les photos ne duraient qu'une quarantaine d'années avant de perdre en éclat. Était ce là un indice sur la période de la catastrophe ? Cette cité existait encore il y a environ une quarantaine d'année. Ou la jeune femme était elle en présence d'un miracle ? Une rescapée de toute cette catastrophe.

La photo en relief et d’une netteté inégalée même à l’ère moderne, montrait un jeune homme enlacé par une personne âgée. Il était facile d'oublier que des humains avaient vécu là, même si tout le criait. Les immeubles, les boulevards, les ruelles, certes toutes détruites... Mais ce n'est qu'en voyant de genre de vestiges qu'on arrive à mettre un visage sur une personne, et à travers le visage on éprouve un lien.

D'une certaine manière, et ce malgré sa sensibilité, il en était de même pour Dalanda. Possiblement et donc paradoxalement, la raison était à cause de ses capacités. Elle se sentait toujours "connectée". Mais ici, cette absence rendait la notion de vie étrangère. Trouver cette photo était comme trouver un bébé dans une décharge. Il y a plein de signes de présence humaine: bouteilles, cartons, équipement, mais on n'imagine pas une vie de chair et de sang au milieu de ces détritus. Alors avant d'avoir vu cette photo elle comprenait bien que des personnes avaient vécu ici, mais elle n'arrivait pas à l'intégrer. Quelque chose lui manquait, pour pouvoir y arriver. C'est à travers cette photo qu'elle put se demander qu’elle avait été leur histoire à ces deux personnes.

Avaient-ils réussi à s’échapper quelque part ? Ou avaient-ils péris avec cette ville ? Qu’avaient-ils bien pu ressentir alors que le plafond se détachait de ses fondations et que la terre s’ouvrait sous leurs pieds ?

Eiling toucha la photo de ses doigts recouverts de carapaces métalliques et les deux personnes bougèrent et affichèrent leur plus beau sourire. A cet instant elle ressenti une chaleur agréable titiller le bout de ses ongles, une pincée de joie avait survécu.
  • “Incroyable” - pensa t elle en retirant le doigt, et les personnages revinrent à leur état initial.
Les seules autres décorations étaient une armoire qui ne tenait plus debout et dont le contenu était méconnaissable, décomposé par le temps, et qui se déversait partiellement sur le sol. Ainsi qu'un divan auquel il manquait sa moitié.

  • On a une bonne vue sur la ville comme promis - se vanta Cid en posant le sac au sol -  file moi les gadgets je vais sécuriser la zone et explorer un petit peu – dit il ensuite en attendant que Dalanda s'installe quelque part.
  • Tu peux les prendre tout seul tu sais – répondit Dalanda s'asseyant devant le sac
  • Ah ça, je n’ai jamais fouillée dans un sac de femme et je ne compte pas le faire maintenant - annonça le félin en lavant la main sans défaire ses bras croisés sur la poitrine. Puis en voyant ou plutôt en imaginant le regard noir que venait de lui lancer son amie ajouta - Je plaisante. Ce sera simplement plus rapide si tu le fais, vu que tu sais où sont les machins.

  • Je préfère cette version – dit-elle en saisissant le sac pour le tirer – J’imagine que tu veux le tout ?
  • Ouais je préfère. Je verrais au cas par cas comment les utiliser.
  • Ok – dit-elle en sortant les mines, les capteurs qui étaient par paire et la nano pate que Cid s’empressa d’utiliser. Il entendit quelques minutes pour que les rayures, les bosses et autres déformations se referment à la surface de l’armure. Puis il fit quelques gestes des épaules, des bras et des jambes pour vérifier que le souci était réglé.

  • Bon c’est pas trop mal – dit-il sans être réellement convaincu – ok je suis parti, je reviens dans une heure, peut être un peu plus.
  • Pas de soucis, j’aurai de quoi m’occuper – lui répondit elle en sortant une tablette quantique de première génération. Le must have en terme d'hi-tech, fabriquée par son entreprise Dynamic Dreams ou DD pour les intimes. Elle synchronisa l'appareil à son armure en quelques secondes. Puis sorti un autre objet qui se déploya en parabole une fois activé, qu'elle connecta à la tablette – Ah oui prend ça aussi, tu scannera la zone en même temps cela fera d’une pierre deux coup – demanda-t-elle en tirant une sphère du sac qu'elle lança à Cid qui l'attrapa en faisant rouler la machine autour de l'index jusque dans la paume de sa main.

  • Pas mal hein ? kruu rru rru - se vanta le félin
  • Ouais mais le scanner coûte près de 3 millions, alors évite de jongler avec tu veux ? - répondit la jeune femme.
  • Je ne te savais pas si proche de tes sous la radine, kruu rru rru - rigola Cid
  • Très drôle, allez file ta présence m'exaspère.
  • Ah oui elle t'exaspère ? Rien que ça ? Je devrai t'exaspérer un peu plus longtemps alors kruu rru rru
  • Arrête tes bêtises et laisse moi travailler. J'ai pas mal de truc à faire - rigola Eiling en ouvrant une application de diagnostic et une autre dans laquelle elle commença à entrer des lignes de code.

  • T’arrivera à joindre l’Essencia ? – Demanda le félin après l'avoir regardé plonger dans son boulot, pendant une dizaine de secondes.
  • Il faut bien que j’y arrive – répondit-elle en tapotant sur le clavier holographique ajusté à la taille de ses doigts.
  • Hey, ils vont bien – affirma Cid de manière rassurante. Il ne voulait pas qu'elle recommence à se sentir coupable de tout.
  • J’espère - avoua Eiling
  • J'en suis certain. Et quand tu l'aura au bout de la ligne ! Dis à Ali de préparer sa pension, parceque cette aventure m’a donné sacrément soif Kruu rru rru - rigol Cid
  • J’imagine que je vais devoir lui filer une avance à la fin - soupira Dalanda en se sentant un plus légère. Un peu rassurée, un peu soutenue...
Cid prit ses babioles et en quelques bonds se perdit dans les ruines de la cité techno-antique, laissant la jeune femme à ses manipulations. Elle avait un lourd poids sur sa conscience que les mots du félin ne pourraient jamais ôter. Il le savait, parcequ'il en était pareil pour lui, peut importe la présence ou les mots de Dalanda, ses blessures n'étaient que couvertes de baume. Son cœur était apaisé pendant un temps puis,le cycle de rage reprenait de plus belle.

Le félin traversait la ville par le haut, à l'image d'un kangourou bondissant. A la différence que ses bonds, à lui, l'amenaient à des dizaines de mètres au dessus du sol, au point où on pouvait affirmer qu'il survolait les ruines. De là-haut, il avait un meilleur visuel sur les dédales, les structures, l'intelligence architecturale... Cependant ce n'était pas par pur plaisir touristique qu'il avalait ainsi les distances, mais pour voir où poser efficacement les quelques pièges en sa disposition.

Aussi étrange que cela pouvait paraître, Marshall était serein et calme pour la première fois depuis longtemps dans cette ville fantôme qui s’étendait à perte de vue. Ce silence, cette absence de tout... Ici il n'y avait personne à haïr, personne à combattre si ce n'était sa propre nature. Dans un endroit pareil, il pouvait peut être "guérir" de ses voix bavardes à lui en faire perdre la tête. Cette sérénité renforça sa volonté de plier bagage une fois l'aventure terminée, son désir de trouver un petit coin abandonné. Peut être planter un petit jardin mais surtout une ferme. Les végétaux c'était bien, mais la viande était plus importante. Se balader à la nuit tomber sans croiser d'humains, sans croiser personne en fait, sur des kilomètres et des kilomètres sans aucune trace de "civilisation". Ah oui ! Ce rêve commençait à lui plaire et à prendre forme dans son esprit. Dans la tranquillité de ce tombeau géant, il se voyait même passer une nuit normale pour la première fois depuis un bon bout de temps.

Dalanda de son côté était en train d’essayer, désespérément, de booster le signal de leur radio pour qu’il passe à travers les couches de roches et bien entendu la tempête. Il n’y avait aucune raison pour que la calamité climatique se soit arrêtée pour ses beaux yeux, elle devait faire rage couvrant la moitié de Meliacor de sa furie ravageuse. Rien que le champ électromagnétique rendait l'idée même d'espérer un contact, complètement stupide. Mais ses actions n'étaient pas animées par la logique, mais par l'espoir tout simplement. C'était également l'espoir qui l'avait amenée sur la piste des artefacts, ou plutôt le désespoir ? Et puis...  L’Essencia avait les équipements nécessaires pour capter leur fréquence, du moins en théorie.

Parallèlement, Eiling reconstituait la carte de tout le chemin qu’ils avaient parcouru et les comparaient aux images qu’ils avaient eu le temps de prendre, les données étant stockées dans son armure. Petit à petit la carte en sa disposition prenait forme.

  • “Il doit bien y avoir un chemin dans ce labyrinthe” - se dit-elle. Puis voyant qu’elle n’avançait pas, leva la tête au plafond pour se changer vite fait les idées – “du calme championne, ne te précipite pas tu vas y arriver. Il n’y a jamais eu de problème sans solution et pour une fois…Pour une fois ? … Il a déjà eut raison une fois ou deux. Non, une seule fois. Oui une seule fois, alors pour une fois Cid à raison on vient à peine d’arriver” -

La jeune femme continua sa besogne sans voir le temps défiler, les minutes avaient été bousculées par les heures. Elle était tellement concentrée dans son monde, son univers de chiffre et de technologie, qu'elle n'avait même pas remarqué que Cid était rentré pour la deuxième fois. Elle n'avait même pas remarqué qu'il lui avait changé le réservoir d'eau dans son armure. Sans faire de bruit il se faufila pour s’asseoir contre un mur qui lui donnait une bonne vue sur la ville, attendant patiemment qu’elle sorte de sa transe, jonglant avec le scanner sphérique pour s’occuper les mains et les idées. Puis !
  • Bzz bzz… ici l’Esse…Bzz… cevez ?
  • Oui !! OUI !!! – hurla Dalanda en se levant d'un bond, avant de se rasseoir à nouveau, prise de panique que le signal pouvait disparaître – Ali tu m’entends ?? - demanda-t-elle en retenant son souffle, sous le regard calme et inquiet de Marshall. Pour l'instant il était trop tôt pour sauter de joie, mais il attendait aussi de bonne nouvelles.
  • Bzz…alanda ? Bzz... est bien t…bzz ? bzz…ey les mecs c…bzz…va bien ? Ou êt…bzz…
  • Allô !! Allô !!Merde Je vous reçois mal, attendez une seconde ! - demanda Eiling, paniquée, essayant de bidouiller le cœur du système, même si elle savait pertinemment que le problème n'était pas matériel. Cid l'observait sans dire un mot, il ne voyait pas comment la débarrasser de ce stress. Lui tapoter l'épaule ? Lui tapoter la tête ? Lui tapoter les fesses ? Lui dire des mots ? Mais lesquels ? Alors il regardait en silence en espérant que tout se passe pour le mieux - Putain !! Me fait pas ça petite parabole, soit gentille tu veux ! – dit-elle en continuant sa besogne inutile.

  • Al…bzz…perd…bzz…gnal, la…bzz…tion…bzz…tit peu tend…bzzz…côté…bzz…ques vaissea…bzz… ses et ils n’ont pas…bzz… vouloir nous lâcher…bzz…semer…bzz…vient vous chercher ?!!
  • Non ! Non ! Allo ! Fait chier ! – dit-elle alors que le signal disparu sans retour. Elle balança son tournevis non sonique à l’autre bout de la pièce le plantant dans le mur – arghhh !!
  • Ils ont l’air d’aller bien, c’est déjà ça – lui dit Cid en se voulant rassurant
  • Je ne sais pas si on a écouté le même message mais pour moi ils ont l’air d’être dans la merde jusqu’au cou - répondit la jeune femme en se prenant la tête entre les mains, comme pour une ablution. En réalité elle était juste épuisée
  • Ils sont vivants c’est déjà ça – se rectifia Cid.

  • Merde, dans quoi je nous ai embarqué – se murmura Dalanda en se prenant la tête dans les bras. Elle ne la leva que lorsqu’elle sentit un contact , Cid était accroupi derrière elle la main posée sur ses fragiles épaules qui supportaient tellement de culpabilités. Des petites épaules de géante...
  • Ça va aller ok ? On va s’en sortir, ils vont s’en sortir, tout va aller pour le mieux fait-moi confiance – le félin essaya de l'apaiser en prenant le ton le plus rassurant possible.
  • Je n’aime pas quand nos rôles sont inversés – dit-elle en prenant la main lourde de Cid. Le geste était agréable, et chaleureux.
  • Je ne vois pas de quoi tu parles, j’ai toujours été la voix de la raison – se venta le colosse en lui tapotant la tête avant de se relever – "épaule check, tête check, fesse je vais peut être éviter. Ok 9/10" - pensa le félin en se sentant bien, fier de lui - On va miam miam et dodo - annonça t il ensuite

  • Arrête de me prendre pour une gamine, c’est vraiment chiant - rétorqua la jeune femme en essayant d'ôter la main de Cid de sa tête, mais elle du y mettre beaucoup d'efforts avant qu'il ne remarque sa tentative.
  • Non j’avais juste la flemme de dire des mots Kruu rru rru - avoua Cid amusé par le geste de son amie - Allez file moi cette ignominie en conserve qu'on en finisse
  • Arrête un peu de te plaindre sur la nourriture.
  • Dis-donc tu veux que j'arrête plein de trucs toi Kruu rru rru - rigola le félin.

  • Ce serait très apprécié effectivement - sourit Dalanda en retour en réussissant enfin à enlever le "tronc d'arbre" du sommet de son crâne .
  • Rêve toujours Krru rru rru - répondit Cid amusé par son action un peu puérile - ET par rapport à la bouffe, j'ai besoin de protéines moi, pour maintenir ce corps d'apollon
  • Il y a toutes les protéines et vitamines nécessaires pour ton organisme là dedans - expliqua Dalanda en lui tendant la boîte
  • Peut être, mais c'est pas pareil. C'est pas naturel, c'est pas biologique c'est tout. J'ai un estomac fragile qui a besoin de trucs spécifiques
  • Haha ! Toi un estomac fragile ? Tu mangerais des cailloux que ça ne ferait pas de différence
  • Déjà ça dépend de la sauce que je verse sur le caillou krru rru rru...

  • “Hey Dalanda, le sourire te va si bien que cela en ait aveuglant…” - entendit il encore la même voix que tout à l'heure. Celle de sa raison peut être ? L'expression de ce qu'il enfoui tout au fond de lui ? Comme signe de faiblesse peut être ? Son tabou artificiel ?
  • “Tu peux arrêter deux secondes les mots doux et tout ? C’est très perturbant et franchement, tu peux juste fermer ta gueule à jamais ?”
  • “Soit franc avec toi même”
  • “De quoi tu parles ? Allez casse toi maintenant !”

  • Cid, merci d'être là - lui dit Dalanda en se retournant pour le serrer dans ses bras
  • Oui, bon pas de quoi. Allez bonne nuit – dit-il confus par toute cette émotivité. Le contact, il ne connaissait plus vraiment. La violence il s'y retrouvait, c'était simple, c'était carré. Là, les histoires d'amitié, les véritables amitiés, c'était bizarre et compliqué. Étrange qu'il ne se rende pas compte qu'il se débrouillait pourtant pas si mal que ça. L'esprit est une énigme des plus fascinante...


Marshall grimpa aux étages du dessus complètement délabrés, et s'assit à la manière d'un gros chat sur un bout de sol pendant au dessus du vide. De là-haut il pouvait avoir une meilleure vue et une distraction de ses pensées sentimentales.
Durant sa reconnaissance, le félin avait pu constater que la ville était bien plus grande qu’il ne l’avait imaginé. Elle devait s’étendre au moins sur quatre vingt dix kilomètres carrés, voir plus. L'idée que quelque chose d'aussi titanesque puisse se retrouver sous terre était juste inconcevable, et pourtant. Pourtant cette citée était logique, car personne ne pouvait vivre à la surface. Renoncer au ciel bleu et au soleil naturel pour se terrer à des kilomètres sous la surface, n'était qu'une question de survie pour fuir la rage de la nature: l'hydre.                

Une image de cartoon parcouru son esprit, une caricature d’un individu en robe de bain, levée par le vent de Meliacor, une tasse de café gelée dans sa main, et se disant “c’est moi ou il y a un peu de vent ce matin ?”.

Non, il était évident que la vie à la surface était impossible, alors bien sur que la vie ne pouvait se développer que soit sous terre, ou au dessus, dans l'orbite basse. Chacune de ces solutions était complexes à mettre en place, mais réalisable. Ce n'était pas une question de technologie. Alors pourquoi choisir de se retrouver sous terre ?
Pourquoi ne s'étaient ils pas enfui ailleurs ? Ou peut être: pourquoi ne s'étaient ils pas tous enfui ailleurs ? La possibilité que des humains de Meliacor aient colonisé d'autres mondes n'est pas négligeable, loin de là. Qu'est ce qui les rattachait à ce monde qui voulait leur mort ?

Ces ruines ne pouvaient qu’éveiller la curiosité de Cid ainsi que celle de ses "hôtes"
  • “Peut être que la seconde genèse n’était pas une idée si conne après tout” - entendit il une de ses voix
  • “Je pense plutôt à l’effet m… - essaya de répondre une autre
  • “Non, non…Ou peut être que si, mais comment ? de toute façon les deux hypothèses ne sont pas mutuellement exclusives” - expliqua une troisième
  • “Mais tu préfère croire à la seconde genèse ? - rétorqua la deuxième
  • “Oui, personnellement je préfère…” - admit la première
  • “C’est non scientifique” - réagit la troisième
  • "Roarr !!!" - rugit intérieurement Cid pour mettre fin au capharnaüm de voix qui venaient de partout et nulle part à la fois -  “La science n’est que la religion de l’explicable. Mais pour le 1% dont elle a la réponse il reste 99% d’inconnu. Il n’y a pas si longtemps personne n’aurait pu concevoir notre existence. Il n’y a pas si longtemps personne n’aurait pu imaginer l’arrivé des kiss”
  • " Hmm...Ce n’est pas entièrement faux. Mais...” - essaya de continuer le débat la deuxième
  • “Mais rien du tout" - coupa le félin - "Maintenant foutez moi la paix, vous me filez la migraine. Tssk, il faut absolument que je trouve une solution pour les faire disparaître”- pensa-t-il. La situation commençait à devenir compliquée à gérer. D'habitude ce n'était pas comme ça. Mais depuis son arrivée sur cette "foutue planète", il pouvait sentir la scission de sa personæ s’aggraver.

Cid avait pensé que le calme lui était bénéfique mais la réalité vint toquer à la porte. La folie n'avait pas d'environnement de prédilection, elle existait dans le bruit, dans le cancan, dans le vide sidéral, au sein même de la logique. La "maladie" pouvait survivre indépendamment des conditions, et il fallait lui faire face. Tout seul c'était pratiquement impossible, car le cerveau atteint se reprogrammait pour cette nouvelle norme. La logique dérivait et sans même qu'on ne s'en rende compte, elle était déjà loin de toutes les conventions, de toute compréhension.

Cette situation ne laissait à Cid que deux solutions: la première était de prendre au sérieux les visites chez le docteur Willmann sans qu'il n'y ait de garanties de réussite, et la deuxième était effectivement de partir loin de tout, au risque de sombrer dans la démence.
  • Sigh ! - soupira Marshall. Penser à son futur incertain n'avait rien de rassurant. Ma pensée de faire du mal à ceux qu'il avait laisser entrer dans son cercle d'estime l'attristait également. La peur de ne rien pouvoir y faire, le terrifiait. Il avait perdu tellement de choses qu'il comptait comme acquises et c'est une douleur que personne ne devait revivre...

Cependant des évènements qu’il ne pouvait se permettre d’ignorer le ramenèrent dans le présent. Son rythme cérébral capta un danger imminent !!


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